1 - 5 Paul accusé devant Festus
1 Festus donc, trois jours après son arrivée dans la province, monta de Césarée à Jérusalem. 2 Les principaux sacrificateurs et les notables d’entre les Juifs portèrent plainte devant lui contre Paul ; et ils lui demandaient avec insistance – 3 contre [Paul] – la faveur de le faire venir à Jérusalem : ils préparaient une embuscade pour le tuer en chemin. 4 Festus répondit que Paul serait gardé à Césarée, et que d’ailleurs lui-même allait bientôt partir. 5 Que les hommes influents parmi vous, dit-il, descendent donc avec [moi] ; et si cet homme a commis quelque mal, qu’ils l’accusent.
La scène autour de Paul a changé. Festus, qui a succédé à Félix en tant que gouverneur de Judée, s’installe à Césarée. Césarée était la capitale politique, tandis que Jérusalem était la capitale religieuse de la Judée, le cœur du judaïsme. De bonnes relations avec Jérusalem étaient d’une importance capitale pour le maintien de la paix dans sa région. C’est pourquoi, peu après avoir pris ses quartiers dans sa résidence officielle de Césarée, Festus monte à Jérusalem pour faire connaissance avec les chefs de cette ville.
Là, il s’implique directement dans la cause de Paul. Deux ans plus tard, les Juifs n’ont pas oublié Paul et n’ont pas perdu leur haine. Depuis son arrivée à Jérusalem, les Juifs ont toujours visé sa mort (Act 21:27-31 ; 22:22 ; 23:10-15 ; 25:3). Leur intention de tuer n’a pas diminué. Un nouveau gouverneur offre une nouvelle occasion de se débarrasser de leur ennemi juré.
Une délégation de principaux sacrificateurs et de notables d’entre les Juifs porte plainte devant lui contre Paul au cours de sa visite. Le caractère distingué de la compagnie des accusateurs montre clairement à quel point le cas de Paul leur tient encore à cœur. En plus de leur acte d’accusation, ils déposent aussi une demande. Paul est toujours emprisonné à Césarée et ils demandent qu’il vienne à Jérusalem. Maintenant que Festus est là et eux aussi, l’affaire pourrait être réglée en un rien de temps.
Leur plan sordide consiste alors à tendre une embuscade à Paul en chemin et à le tuer. Ils ne sont pas non plus convaincus que Festus condamnera Paulus. S’ils peuvent s’arranger pour tuer eux-mêmes Paul, ils seront au moins débarrassés de leur ennemi une fois pour toutes.
Mais leur plan échoue. Il est possible que Festus ait entendu parler des plans précédents ou qu’il les ait lus dans des rapports, mais il n’accède pas à la demande des Juifs. Paul continue gardé à Césarée, où il retournera lui-même bientôt. Nous voyons là la main de Dieu. Festus veut effectivement faire plaisir aux Juifs dans la mesure où il leur donne la possibilité pour les hommes influents de voyager avec lui et d’accuser Paul à Césarée.
6 - 12 Paul en appelle à César
6 Puis, sans prolonger sa visite plus de huit ou dix jours, il descendit à Césarée ; le lendemain, il siégea au tribunal, et donna l’ordre de faire comparaître Paul. 7 Lorsqu’il fut arrivé, les Juifs qui étaient descendus de Jérusalem l’entourèrent, portant contre lui beaucoup de graves accusations qu’ils ne pouvaient pas prouver, 8 tandis que Paul se défendait, [en disant] : Je n’ai commis aucune faute, ni contre la Loi des Juifs, ni contre le temple, ni contre César. 9 Mais Festus, voulant gagner la faveur des Juifs, répondit à Paul : Consens-tu à monter à Jérusalem pour y être jugé sur cette affaire devant moi ? 10 Paul dit : Je suis ici devant le tribunal de César, c’est là que je dois être jugé. Je n’ai causé aucun tort aux Juifs, comme tu le sais toi-même très bien. 11 Si donc j’ai fait du tort et si j’ai commis une action qui mérite la mort, je ne refuse pas de mourir ; mais si rien n’est [vrai] de ce dont ils m’accusent, personne ne peut me livrer à eux : j’en appelle à César. 12 Alors Festus, après avoir conféré avec le Conseil, répondit : Tu en as appelé à César, tu iras à César.
Après huit ou dix jours, Festus retourne à Césarée. Le lendemain de son retour, il siège au tribunal et ordonne que Paul soit amené devant lui. En siégeant au tribunal, le procès de ‘l’affaire Paul’ prend un caractère officiel. Mais quel genre de juge siège au tribunal ? C’est un homme qui ne pense qu’à ses propres intérêts.
C’est aussi ce qui s’est passé à l’époque avec Pilate, dont nous lisons aussi qu’il « s’assit sur l’estrade [ou: au tribunal] » (Jn 19:13) et cela pour prononcer la justice sur le juge de toute la terre (Gen 18:25) qui se tenait devant lui. La justice qu’il a prononcée était la forme la plus grande et la plus grossière d’injustice jamais commise.
C’est un grand encouragement de savoir qu’en face de tous les tribunaux terrestres, il y a un tribunal céleste. Sur les tribunaux terrestres se sont assis et s’assoient des gens incapables d’un jugement impartial. Sur le tribunal céleste siège celui qui administrera une justice parfaite (Rom 14:10 ; 2Cor 5:10).
Devant Festus apparaissent aussi les Juifs qui s’étaient déplacés à son invitation. Luc mentionne qu’ils « l’entourèrent », faisant probablement référence à Paul. Tels des limiers, ils l’entourent. C’est alors qu’éclate leur torrent « beaucoup de graves accusations ». Luc n’entre pas dans le détail de leur contenu. D’après la défense de Paul, nous pouvons voir de quels points ils l’accusaient.
Comme les Juifs n’avaient toujours pas obtenu gain de cause, ils auront épaissi les accusations et les auront aussi élargies autant que possible. Ce faisant, ils ont fait terriblement violence à la vérité. Il n’est pas étonnant qu’ils soient incapables de prouver ne serait-ce qu’une seule accusation. C’est précisément leur exagération dans les accusations qui permet à Paul de se défendre facilement.
À cela s’ajoute le fait que ce qui est important pour les Juifs n’intéresse pas du tout Festus. Qu’a-t-il à voir avec la loi des Juifs ? Lorsque les Juifs accusent Paul d’enseigner aux nations qu’elles n’ont pas à observer la loi, cela ne lui dit rien. Il en va de même pour l’accusation selon laquelle il aurait profané le temple.
L’accusation selon laquelle il aurait fait quelque chose contre César pourrait être quelque chose de significatif. Cette accusation était basée sur la prédication à un autre roi que César, à savoir Jésus (Act 17:7). Mais il n’y a pas eu d’appel de Paul à se rebeller contre César. Au contraire, il enseignait qu’il fallait se soumettre au gouvernement (Rom 13:1).
Ce n’est pas une affaire pour Festus. Non, il est clair pour lui qu’il n’a pas devant lui un danger pour l’état, quelqu’un qui mettrait en péril la ‘Pax Romana’ largement vantée, la paix romaine. Alors que Festus a jusqu’à présent agi correctement et aurait dû maintenant procéder au relâchement de Paul, il fait une proposition tout à fait contraire à la loi romaine. Il propose que Paul monte à Jérusalem et que ce soit là qu’il soit jugé devant lui.
Luc ajoute le motif de cette proposition : Festus veut gagner la faveur des Juifs. Le principal souci de Festus est de gagner la faveur des Juifs, comme ce fut le cas pour Félix (Act 24:27) et Pilate (Mc 15:15). Une bonne relation avec les Juifs est plus importante pour lui que de rendre justice à un prisonnier qui cause des ennuis, ou du moins en est accusé. Il prévoit que relâcher Paul ne lui causera que de gros ennuis.
Paul perçoit ses intentions. Auparavant, il était désireux d’aller à Jérusalem, mais il ne veut plus le faire. Il ne veut pas comparaître devant un tribunal juif, mais devant celui de César. En appelant à César, il reconnaît la manière dont le Seigneur s’y est pris avec lui, à savoir qu’Il l’a conduit hors de Jérusalem. Il reconnaît aussi le tribunal de César et c’est à lui qu’il en appelle. Le tribunal sur lequel Festus est assis est celui de César. Festus, en tant que son représentant, exerce son autorité.
Les premiers chrétiens ont subi de nombreuses injustices, mais les accusations étaient toujours infondées. Ils obéissaient aux lois émises par le gouvernement, ils ne pouvaient donc pas être accusés sur cette base. Ce qu’ils souffraient était dû au fait qu’ils étaient chrétiens (1Pie 4:15-16).
Paul s’adresse également à la conscience de Festus en lui disant qu’il sait très bien que lui, Paul, n’a causé aucun tort aux Juifs. Par cette déclaration, il disqualifie Festus en tant que juge. Paul exprime sa soumission à la justice. S’il avait fait quelque chose qui méritait la mort, il ne refuserait pas de mourir.
En termes voilés, il accuse même Festus de vouloir le livrer aux Juifs par faveur. Il ne peut pas accepter cela sans poser de questions. Par conséquent, il en appelle à César. Si nous nous demandons s’il n’aurait pas mieux valu qu’il s’en remette à Dieu, il est clair que Dieu fait en sorte que Paul se rende à Rome, comme le Seigneur le lui a dit (Act 23:11). C’est là qu’il témoignera devant César en personne.
La question se pose aussi de savoir si nous devons nous demander si Paul n’aurait pas mieux fait de remettre son cas entre les mains de Dieu. N’est-il pas plutôt de notre devoir de rappeler aux gens leurs responsabilités et que cela inclut aussi, le cas échéant, ce que le gouvernement nous demande ?
Il ne s’agit pas de combattre toutes les mauvaises décisions qu’un gouvernement prend ou les mauvaises lois qu’il promulgue. Comme mentionné précédemment, Paul n’a jamais demandé à ce que le gouvernement soit tenu responsable de tout ce qui est mauvais. En fait, il dit que nous devrions nous soumettre au gouvernement sans poser de questions. Dès que le gouvernement dit quelque chose que nous devrions faire ou qui implique notre témoignage devant le Seigneur, nous pouvons emprunter les chemins proposés à cet effet. C’est la raison pour laquelle Paul en appelle ici à César.
Il semble que Festus n’ait pas compté là-dessus. Que doit-il faire maintenant ? Il ne peut pas relâcher Paul, parce qu’alors les Juifs vont exploser. À Jérusalem, Paul ne veut pas aller et il ne peut pas l’y forcer, car Paul est un citoyen romain. Avant de prendre une décision, il se met d’accord avec le Conseil, c’est-à-dire avec ses conseillers, sur ce qui est le mieux.
Luc ne nous dit pas ce qui a été discuté. Ce n’est pas non plus important, car le résultat est que Festus confirme que Paul ira à César. Le Seigneur a décidé que Paul irait à Rome, et c’est donc à Rome qu’il se rend. Avec les mots « tu en as appelé à César, tu iras à César », Festus assure à Paul qu’il ira voir César à Rome.
13 - 22 Festus expose à Agrippa l’affaire de Paul
13 Quelques jours après, le roi Agrippa et Bérénice vinrent à Césarée pour saluer Festus. 14 Comme ils passaient là plusieurs jours, Festus exposa ainsi au roi l’affaire de Paul : Il y a [ici] un homme que Félix a laissé prisonnier ; 15 lorsque je suis allé à Jérusalem, les principaux sacrificateurs et les anciens des Juifs ont porté plainte à son sujet, sollicitant une condamnation contre lui ; 16 mais je leur ai répondu que ce n’est pas la coutume des Romains de livrer quelqu’un avant que l’accusé ait ses accusateurs en face de lui et qu’il ait l’occasion de se défendre de ce dont il est accusé. 17 Quand ils se sont présentés ici, sans aucun délai, le lendemain, j’ai siégé au tribunal et j’ai donné l’ordre d’amener cet homme. 18 Mis en sa présence, ses accusateurs n’ont avancé aucune charge grave quant aux méfaits que moi je supposais : 19 ils avaient avec lui des controverses concernant leur propre culte religieux et un certain Jésus qui est mort, mais que Paul affirmait être vivant. 20 Comme j’étais dans l’embarras pour procéder à une information sur de tels sujets, je lui ai demandé s’il consentirait à aller à Jérusalem pour y être jugé sur cette affaire. 21 Mais Paul a fait appel : [il a demandé] à être réservé au jugement d’Auguste ; alors j’ai donné ordre de le maintenir sous garde jusqu’à ce que je l’envoie à César. 22 Agrippa [dit] à Festus : Je voudrais bien, moi aussi, entendre cet homme. Demain, dit Festus, tu l’entendras.
La décision que Paul ira voir César à Rome a été prise. Cela ne signifie pas qu’il sera immédiatement transporté. Il reste encore à faire les préparatifs nécessaires. Ce faisant, le principal souci de Festus, il s’avérera plus tard, est de trouver une raison plausible pour justifier le transport de ce prisonnier vers César.
À sa grande joie, au bout de quelques jours, le roi Agrippa et Bérénice apparaissent. Ils viennent féliciter Festus pour son nouveau travail. Leur arrivée est une aubaine, car Agrippa connaît bien les coutumes juives. Le roi Agrippa est accompagné de Bérénice, sa sœur, avec laquelle il vit.
Festus présente « l’affaire de Paul » à Agrippa. Il raconte comment les choses se sont déroulées. Comme tout le monde le fait, Festus présente l’affaire de la manière qui lui est la plus favorable. Il se présente comme le défenseur sincère de la justice, comme si elle devait suivre son cours et qu’il s’y engageait. Les faits sont tels qu’il les connaît. Il raconte que son prédécesseur Félix, a laissé prisonnier un homme au sujet duquel il a reçu à Jérusalem des accusations de la part des Juifs qui sollicitaient une condamnation contre lui.
Il raconte comment il a répondu aux Juifs et que, sans délai, il a fait venir « cet homme » devant son tribunal et a écouté les accusateurs. Les soupçons qu’il avait sur ce que Paul avait pu faire de mal se sont trouvés infondés. Les accusations ne portaient que sur des questions litigieuses concernant leur loi. Il avait aussi entendu quelque chose concernant « un certain Jésus qui est mort, mais que Paul affirmait être vivant ».
La façon dont Festus parle du Seigneur Jésus montre une totale indifférence. Festus s’est fait raconter l’essentiel de l’évangile, dont il transmet le résumé à Agrippa : le Seigneur Jésus est mort et être vivant (1Cor 15:3-4). Pour Festus, l’histoire de la résurrection n’est qu’une superstition juive. Festus ne dit pas ‘revivre’, et ne parle pas non plus de ‘résurrection’. Tout compte fait, Festus prononce l’innocence de Paul. Encore une fois, le témoignage de l’innocence de Paul sort de la bouche d’un fonctionnaire païen.
Ne sachant pas ce qu’il pouvait faire d’autre dans cette affaire, il propose à Paul d’aller à Jérusalem pour y être jugé. Il cache simplement à Agrippa le raisonnement qui sous-tend sa proposition. Il poursuit immédiatement en mentionnant que la réponse de Paul a été d’en appeler à César. Il a accepté cet appel, donnant l’ordre de le maintenir sous garde jusqu’au moment où il serait envoyé à l’empereur.
Agrippa s’intéresse tellement à Paul à cause de ce rapport qu’il exprime son désir d’entendre « cet homme » lui-même. Festus lui promet qu’il lui en donnera l’occasion demain.
23 - 27 Paul amené devant Agrippa
23 Le lendemain donc, Agrippa et Bérénice vinrent en grand apparat et entrèrent dans la salle d’audience avec les chefs militaires et les principaux personnages de la ville ; Paul, sur l’ordre de Festus, fut amené. 24 Festus [dit] alors : Roi Agrippa et vous tous qui êtes ici présents avec nous, vous voyez cet homme au sujet duquel toute la multitude des Juifs m’a sollicité, aussi bien à Jérusalem qu’ici, en criant qu’il ne devrait plus vivre. 25 Mais je me suis rendu compte qu’il n’avait commis aucune action qui mérite la mort et, comme cet homme lui-même en a appelé à Auguste, j’ai résolu de le lui envoyer. 26 Comme je n’ai rien de sûr à écrire à l’empereur à son sujet, je l’ai amené devant vous, et principalement devant toi, roi Agrippa, de sorte qu’après avoir procédé à l’interrogatoire, j’aie quelque chose à écrire ; 27 car il me semble déraisonnable d’envoyer un prisonnier sans indiquer en même temps les charges qui pèsent sur lui.
Le lendemain a lieu la remarquable rencontre entre les grands de la vie et le rebut du monde (1Cor 4:13b). Agrippa et Bérénice entrent en grande apparat dans la salle d’audience, avec dans leur entourage les chefs militaires et les principaux personnages de la ville. Lorsqu’ils ont pris place, Festus fait amener Paul devant lui. Au milieu de la splendeur mondaine, un petit homme enchaîné apparaît.
C’est ainsi que le Seigneur l’a dirigé pour accomplir la parole qu’il a parlé quand Il disait que Paul porterait son nom devant les rois (Act 9:15). C’est pourquoi l’inculpé Paul fait face à des impies aux mœurs dépravées. Jamais auparavant il n’avait eu un tel auditoire.
Lorsque Paul s’apprête à ouvrir la bouche, la scène change. Les juges deviennent alors les accusés et l’accusé devient le juge. La pitié a peut-être rempli le cœur des dignitaires présents lorsqu’ils ont vu le pauvre prisonnier, mais une pitié encore plus grande a dû remplir le cœur de Paul à la vue de tout le vide de ces âmes perdues.
Festus ouvre la session. En disant « vous voyez cet homme », il désigne Paul comme un spectacle à voir. C’est l’homme qui réussit à contrarier toute la foule des Juifs au point qu’ils ne souhaitent qu’une chose : sa mort. Mais, poursuit Festus, je n’ai pas pu découvrir quoi que ce soit qu’il ait pu faire qui mérite la mort.
Festus témoigne à nouveau de l’innocence de Paul auprès d’Agrippa, mais il le fait maintenant devant tous les principaux personnages de la ville (versets 18,25). Il ne peut cependant pas le relâcher, car le prisonnier en a appelé à César. Il a accédé à cet appel et il va donc l’envoyer « à Auguste », une désignation pour César.
C’est alors que Festus évoque le problème auquel il est maintenant confronté. Il doit envoyer Paul à César, mais il n’a pas encore réussi à formuler les charges concrètes. Festus espère qu’Agrippa pourra l’aider à mettre par écrit quelque chose qui lui évitera de perdre la face s’il envoie Paul à Rome.